Star égyptienne du football africain des années 2000, Mido avait des qualités certaines pour devenir un grand attaquant en Europe. Mais la tête brûlée passée par l’OM s’est égarée dans un égo trip de fils-à-papa capricieux… 

Chérif Ghemmour

« Mido a été le coéquipier le plus dingue que j’ai eu ». Signé Didier Digard en 2020 pour un mag du Middlesbrough FC où il était passé (2008-2010) : « Remplaçant lors de trois rencontres pour blessure, Mido entre en match et plante un doublé. Au match suivant contre Sunderland, avant le coup d’envoi, il dit au coach qu’il est blessé : ‘Mais tu viens de faire l’échauffement normalement !’, ‘Coach, vous auriez dû me titulariser plus tôt ! » Et c’est parti pour les dingueries !

Mido, le joueur le plus stylé du foot égyptien

Ibra & Mido sont dans un bateau…

Parmi les tarés du foot africains, tels les El-Hadji Diouf, Eto’o ou Mokoena, Ahmed Hossam Hussein Abdelhamid dit « Mido » figure pas loin du top. À Marseille, personne n’a oublié l’énorme sensation produite à son arrivée à l’OM à l’été 2003 : « C’est normal, justifiait Christophe Champy, alors rédacteur en chef d’OMtv pour sofoot.com en 2013. Il venait de la jet-set égyptienne, il était sorti avec Miss Belgique, il parlait un anglais parfait. C’était vraiment un play-boy international. » Beau gosse d’1m88, teint mat de latin lover, cheveux longs retenus par un bandeau noir, pendentif en argent au cou, l’attaquant égyptien arrivé du Celta Vigo, prêté par l’Ajax, a aussi du ballon. Il séduit le Vélodrome par son jeu de tête létal et un pied gauche soyeux et puissant. Mais, éclipsé par un Drogba en feu, Mido s’éteint en cours de saison : « C’est surtout qu’il avait 10 kilos en trop, avançait Christophe Champy. À 20 ans, le mec avait déjà l’argent et la gloire. En fait, il ne courait que pour une chose, les filles (Mido était pourtant marié, ndlr). La première chose qu’il est venu me demander, c’est le numéro de téléphone de la maquilleuse, et si elle était OK pour un plan rapide.»

Mido, le joueur le plus stylé du foot égyptien

Le joueur égyptien le plus cher de l’histoire qui avait signé pour cinq ans à l’OM est bradé moitié-prix à la Roma à l’été 2004… Même attitude à l’Ajax où il avait débarqué en 2001 à 18 ans, après avoir brillé à la Gantoise la saison précédente. Sa rivalité sportive avec le jeune Zlatan amorcée dans le vestiaire par un jet de ciseaux à la face du géant suédois (heureusement esquivée) avait débouché sur une forte amitié qui dure encore aujourd’hui ! Les deux rookies qui offrent à l’Ajax un beau doublé coupe-championnat 2002 ont multiplié les frasques avec un troisième givré, Andy van der Meyde, comme se faire des courses de dragsters dans les environs d’Amsterdam… Zlatan roule en Mercedes alors que son pote égyptien alterne entre Ferrari et BMW Z. Là est leur grande différence : assoiffé de reconnaissance, Ibra sait se fixer des limites et bosse dur pour être le meilleur alors que Mido, dilettante absolu, va gâcher son talent. Car si le fils d’immigré bosniaque a connu la misère dans le ghetto de Malmö, l’Egyptien a nagé dans l’opulence cairote prodiguée par un père businessman hyper fortuné. Et à la différence d’autres fils de riches devenus footballeurs accomplis comme Pirlo ou Kakà, Ahmed Hossam Hussein Abdelhamid a cédé très tôt à la vida loca digne d’un héros de Bollywood.

Mido, le joueur le plus stylé du foot égyptien

Ado surdoué au sein du mythique club du Zamalek SC, international A à 18 ans, il devient trop prématurément le King of Cairo, jeune Roi du Caire. À l’Ajax, le crack a ainsi vite désespéré son coach Ronald Koeman qui, lassé de ses absences à l’entraînement et de ses blessures réelles ou imaginaires, l’a expédié en équipe réserve puis envoyé en prêt à Vigo. « En Egypte, on le traite comme un Dieu », fulmine Ronald. Exact ! Starifié par les tabloïds égyptiens, son mariage à 20 ans a été retransmis par les télés nationales. Premier footballeur du pays expatrié dans un grand club européen à Amsterdam,  le wonderkid est adulé à distance, rappelait-il : « en Egypte, tous les cafés et restaurants se branchaient sur les matchs de l’Ajax. L’Ajax qui jouait, c’était en fait Mido qui jouait.»

CAN 2006 : il traite le sélectionneur d’âne !

Sa célébrité a dépassé les frontières, comme le décrivait The Guardian en 2003 : « Mido est le centre d’intérêt de la rue arabe. Son nom est sur toutes les lèvres des hommes et des femmes arabes. Il est pour les Egyptiens ce qu’était Maradona pour les Argentins. Peut-être même plus. » Un statut de méga star internationale qui rendra sa carrière de footballeur secondaire. Car Mido va allègrement bousiller son talent entre frasques et blessures, en multipliant les clubs après avoir quitté la Roma en 2004. Après Tottenham, Middlesbrough, Wigan, Zamalek, un retour à l’Ajax puis un autre retour au Zamalek, il signe en 2013 une fin anonyme à Barnsley en D2 anglaise. À 30 ans seulement…

Mido, le joueur le plus stylé du foot égyptien

Le summum de son gâchis, il l’a évidemment connu avec les Pharaons à la CAN 2006 au pays. Le jeune playboy aux cheveux longs était aux antipodes du reste d’une sélection nationale peuplée de darons très pieux, humbles, discrets et respectueux des aînés. Titulaire depuis le début du tournoi, le punk pète les plombs en demi-finale contre le Sénégal où il refuse de se faire remplacer à la 77ème. Sur le bord du terrain, il insulte l’immense coach Hassan Shehata en le traitant d’âne, en direct-TV ! Adoré des supporters, le public se retourne pourtant contre lui : « Dehors ! Dehors ! » Un des plus grands clashs de l’histoire de la CAN… D’autant plus qu’il finit par sortir, calmé par le sage vétéran Hossam Hassan, et que son remplaçant Amr Zaki marque aussitôt le but de la victoire (2-1) ! Mais le pays est sous le choc, comme l’avait rapporté Le Monde citant le quotidien égyptien Al-Ahram : « Après l’échange honteux avec son entraîneur, Mido a perdu le respect et l’amour de tous les Egyptiens. » Malgré ses excuses, Mido suspendu illico six mois par la fédé ne jouera pas la finale 2006. Il ne remporta même pas les deux autres CAN 2008 et 2010 gagnées par les Pharaons. Ecarté avant l’édition de 2010, il avait commenté à la troisième personne : « Il n’y a pas un seul Égyptien aujourd’hui qui comprend cette décision. Je ne joue pas en sélection pour Shehata. J’y joue pour les gens pauvres de la rue. J’espère que l’injustice qui est arrivée à Mido n’arrivera pas à l’équipe d’Égypte.»

Mido, le joueur le plus stylé du foot égyptien

L’ex-footballeur devenu ensuite entraîneur intermittent puis consultant TV sur BeIn Sport pesant un temps 150 kilos jouit pourtant d’une belle postérité notait le magazine Vice en 2017. Sa rebellitude rock’n’roll a contribué à bousculer les conventions sociales de son pays : « Il a changé les mentalités familiales d’ici, relatait déjà en 2005 Mahmoud Gouhary, un de ses premiers coaches. Auparavant, l’éducation était placée bien au-dessus du football. Aujourd’hui, des parents pensent : ‘je veux que mon fils soit comme Mido.» Une dernière pour la route… En juillet 2024, 11 ans après avoir raccroché, Monsieur Moi-je avait déclaré sans rire sur ONTime Sports : « Mon voyage n’est pas encore terminé. Je pense revenir au football en Premier League égyptienne. Je parie que je marquerai au moins 10 buts si je retourne jouer en Championnat. » Aucun club ne l’a jamais contacté.

 

Chérif Ghemmour

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